Tolstoï
Traduit de l’allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac
Pendant trente ans, de sa vingtième à sa cinquantième année, Tolstoï a vécu, dans la création de ses œuvres, insouciant et libre. Pendant trente ans, de sa cinquantième année jusqu’à son trépas, il ne vit plus que pour comprendre et connaître le sens de la vie, luttant avec l’insaisissable, enchaîné à l’inaccessible. Sa tâche a été facile jusqu’au jour où il s’est donné cette formidable mission : sauver, non seulement sa propre personne, mais encore toute l’humanité, par sa lutte pour la vérité. Avoir entrepris cette mission fait de lui un héros – presque un saint. Y avoir succombé en fait le plus humain de tous les hommes.
Berthe Morisot
Derrière la simplicité de sa vie extérieure, derrière la banalité des agitations de sa vie mondaine qu’illuminèrent à la vérité le charme d’une grâce féminine exquise et le sourire d’une constante bonté auquel vint s’ajouter celui d’une tendresse maternelle très profonde, se cache une admirable vie d’artiste : sa vie intérieure, sa vraie vie, celle que révèlent ses œuvres qui furent ses confidentes de chaque jour et qui, à travers leur multiplicité et leur diversité, montrent que, depuis l’enfance jusqu’à la mort, elle est toujours demeurée elle-même dans son art, ce qui ne l’a pas empêchée d’enrichir peu à peu sa palette et de perfectionner et élargir son métier à mesure que se développait sa sensibilité, que s’affinait sa vision et que s’assouplissait sa main.
Émile Zola
Avant de se pacifier dans l’immortalité, la destinée d’Émile Zola aura été étrangement tourmentée. Comme tous les hommes de génie – surtout les hommes d’un génie rude, tenace et humain, – Zola a créé, toujours, autour de lui, de la tempête. Il n’est pas étonnant que la bourrasque souffle encore.
« Son œuvre fut décriée, injuriée, maudite, parce qu’elle était belle et nue, parce qu’au mensonge poétique et religieux elle opposait l’éclatante, saine, forte vérité de la vie, et les réalités fécondes, constructives de la science et de la raison. » (Octave Mirbeau)
Suivi de J’accuse… ! article rédigé par Émile Zola, publié dans L’Aurore du 13 janvier 1898