Vie de Michel-Ange
Il est, au Museo Nazionale de Florence, une statue de marbre, que Michel-Ange appelait Le Vainqueur. C’est un jeune homme nu, au beau corps, les cheveux bouclés sur le front bas. Debout et droit, il pose son genou sur le dos d’un prisonnier barbu, qui ploie, et tend sa tête en avant, comme un bœuf. Mais le vainqueur ne le regarde pas. Au moment de frapper, il s’arrête, il détourne sa bouche triste et ses yeux indécis. Son bras se replie vers son épaule. Il se rejette en arrière ; il ne veut plus de la victoire, elle le dégoûte. Il a vaincu. Il est vaincu.
Cette image du Doute héroïque, cette Victoire aux ailes brisées, qui, seule de toutes les œuvres de Michel-Ange, resta jusqu’à sa mort dans son atelier de Florence, et dont Daniele da Volterra, confident de ses pensées, voulait orner son catafalque, – c’est Michel-Ange lui-même, et le symbole de toute sa vie.